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Boues d'épuration
Quel avenir pour l’épandage ?

Près de 250 participants ont assisté, à Clermont-Ferrand, à une journée d’informations sur l’épandage agricole des boues. Un sujet d’actualité au coeur des relations entre les espaces ruraux et urbains.

Actuellement, en France, 55% des boues des stations d’épuration des collectivités territoriales sont épandues sur des terres agricoles (le reste étant incinéré, mis en décharge ou bien composté). Toutefois, il existe des variations locales fortes quant à l’élimination de ces boues d’épuration d’origine domestique. Bien que dans certaines conditions techniques, l’épandage puisse consister un mode de traitement des boues relativement respectueux de l’environnement et plutôt économique, il se trouve pourtant remis en question dans certaines zones. Dans un contexte où le traitement des déchets urbains est l’objet de tensions croissantes, il est important d’envisager les perspectives possibles de la pratique d’épandage. C’est pour aborder cette problématique, qu’une journée d’information s’est tenue, la semaine dernière, à Clermont-Ferrand. Organisée conjointement par le Cemagref, Métafort et le Crideau (1), en partenariat avec l’Enita, cette journée avait pour but de proposer un cadre de réflexion aux conditions de pérennisation d’épandage des boues en agriculture. Les caractéristiques technologiques, économiques et juridiques ont ainsi été traitées. Outre le déficit d’image, délicates à épandre, les boues de station d’épuration sont parfois peu prisées par les agriculteurs.

 

Confronter les données
«L’une des voies d’amélioration consiste à rétroagir sur les traitements en station, tels que la déshydratation ou le chaulage, pour tendre vers un matériau homogène, bien structuré, mieux à même de séduire les agriculteurs», a précisé Jean-Christophe Baudez du Cemagref. Pour les spécialistes, le travail d’épandage doit être en adéquation avec les exigences posées tant sur le plan agronomique qu’environnemental ou sanitaire. C’est la raison pour laquelle des études d’analyse des sols sont menées régulièrement. Pour disposer d’un outil de traçabilité des boues, des responsables du Cemagref ont ainsi évoqué le logiciel Sigemo, imaginé comme une communauté de données entre les acteurs d’un département. En effet, actuellement les informations sur les plans d’épandage sont éparpillées entre plusieurs institutions. Le recoupement entre deux plans d’épandage est donc difficile à mettre en oeuvre. La solution informatique retenue repose donc sur une architecture par Internet, proche du principe développé pour la téléprocédure pour les agriculteurs qui veulent faire leur déclaration pour la politique agricole commune.
Réglementation stricte
Sur le volet réglementaire, «avant 1997, le statut des boues étaient relativement flou», a expliqué un ingénieur du Cemagref. Depuis 1998, les boues ont pris le statut de déchets potentiellement valorisables. «Aujourd’hui, les choses se sont pacifiées. Nous progressons sur le respect de la réglementation. Les suivis agronomiques avant et après l’épandage font prendre conscience aux agriculteurs de l’intérêt des boues ». Preuves que le travail des spécialistes sur le terrain commence à payer. Service d’assistance technique à l’exploitation des stations d’épurations et autres « missions boues », labellisées par le préfet (2) sont autant d’organismes capables d’apporter une expertise technique et réglementaire précieuse.

(1) Crideau : Centre de recherche interdisciplinaire en droit de l’environnement, de l’aménagement et de l’urbanisme.
(2) Sur le Massif central, deux missions boues ont été labellisées par le préfet, une dans le Cantal et une en Haute-Vienne.

Interview : Jean-Jacques Mordier, agriculteur céréalier à Surat nous livre son point de vue.
La Limagne et les boues d’épuration

Que pensez-vous de la demande sociétale envers les agriculteurs pour participer à la gestion durable des boues d’épuration ?
Jean-Jacques Mordier : «Les élus souhaitent impliquer les agriculteurs à cette gestion en les sollicitant pour réaliser des épandages sur les parcelles. Il est intéres- sant que la société souhaite que les agriculteurs lui rendent service. Cependant, les consommateurs comprennent-ils cette démarche?»


Quelles sont les réticences, selon vous, qui freinent l’implication des agriculteurs dans cette filière ?
J.-J. M : «Si au niveau technique nous avons l’assurance des divers organismes en amont que la qualité des boues ainsi que d’autres paramètres sont contrôlés, il reste toujours des risques. En cas de risque, à qui incombe la responsabilité ? Peut-on admettre que l'agriculteur soit responsable de quelque problème sur des productions alimentaires de première transformation ayant fait l’objet d’un épandage de boues ? Quel serait l’impact du principe de précaution souvent demandé par les consommateurs ? Nous avons de nombreux points encore à éclaircir, ce qui explique notre implication dans la gestion des boues d’épuration.»

Pouvez-vous nous expliquer pourquoi les agriculteurs - en particulier en Limagne - restent réservés ?
J.-J. M : « Les agriculteurs de Limagne sont nombreux à souscrire des contrats avec leurs coopératives. Ces contrats sont cadrés par des cahiers des charges stricts cohérents et fondés pour assurer une sécurité alimentaire au consommateur. L’épandage des boues d’épuration, de part les questions qu’il pose encore, est interdit par ces cahiers des charges. L’intérêt du consommateur est que l’on garantisse cette sécurité. Nous sommes conscients qu’il est nécessaire de gérer durablement ces boues en parallèle de l’incinération et de la mise en décharge. Néanmoins les agriculteurs ont besoin de garanties avant tout, afin qu’ils ne soient pas désignés responsables d’un problème.»

Propos recueillis par David Perret

Edito Gérard RENARD, président de la Chambre d’agriculture du Puy-de-Dôme
Trop d’inconnues

L’élimination des boues de stations d’épuration issues des activités humaines est un sujet qui concerne toute la société. Cette dernière verrait d’ailleurs d’un bon oeil, que l’agriculture y apporte une réponse en acceptant d’épandre les boues sur les parcelles cultivées. Mais cette solution n’est pas applicable dans un département comme le Puy de Dôme qui joue, depuis plusieurs années, la carte qualité de ses productions à travers des filières. La plupart d’entre elles incluent, en effet, une interdiction d’épandage de boues sur les parcelles en contrat ; certaines vont mêmes jusqu’à imposer le principe de rétroactivité sur 10 ans ! Pas question alors pour les agriculteurs de courir le risque de ne plus avoir de contrats à venir et de mettre un frein au développement de productions de qualité sur le département. Ce serait aller à l’encontre des orientations que se sont données la profession et les filières agroalimentaires.
Au delà, si malgré toutes les garanties techniques et réglementaires que l’on connaît à ce jour, un problème sanitaire consécutif à l’épandage des boues était soulevé, c’est encore vers l’agriculteur que la société se tournerait. C’est lui qui serait pointé du doigt et c’est sa production qui ne pourrait être vendue !
Le projet de loi sur l’eau prévoit un fonds de garantie en cas de risque avéré, mais on ne connaît absolument pas les conditions et les modalités d’indemnisation. On ne sait pas non plus, en cas de problème, qu’elle sera l’attitude du propriétaire de la parcelle envers l’exploitant qui aura épandu des boues dans son bon droit, sans son autorisation .
Le débat sur l’épandage des boues de station d’épuration comporte encore trop d’inconnues pour notre département, engagé dans des démarches de productions de qualité en lien avec les filières agroalimentaires. C’est l’image de marque de la profession agricole qui serait touchée si nous acceptions d’entrer dans ce schéma.

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