SDAGE Loire-Bretagne
Pourquoi la profession agricole engage un recours gracieux ?
Le syndicalisme et la coopération contestent le schéma directeur d’aménagement de gestion des eaux du bassin Loire Bretagne déplorant plusieurs vices de forme et de fond.

A la suite d’un long travail de révision, le 3 mars 2022, le comité de bassin Loire-Bretagne a adopté le nouveau SDAGE pour les années 2022 à 2027. Il a été approuvé par l’arrêté de la préfète coordonnatrice de bassin le 18 mars 2022. Lors de la consultation officielle en 2021, les chambres d’agriculture avaient émis des avis défavorables et demandé plusieurs modifications. Mais le texte avait évolué plutôt de manière défavorable pour l’agriculture. Les FRSEA et certaines FDSEA du bassin Loire-Bretagne et la coopération agricole ont donc décidé d’engager un recours gracieux. Il prend la forme d’un courrier très argumenté, envoyé début juin à la préfète de bassin par un avocat, pour lui demander plusieurs modifications du document en raison de vices de forme et de fond. Il témoigne surtout de la non prise en compte des intérêts agricoles et d’un fort entêtement de l’administration, comme le résume Nicolas Bonnefous, agriculteur dans l’Allier, qui siège au comité de bassin : « On a été très peu entendu pendant l’élaboration du Sdage. Il y un certain nombre de dispositions que l’on conteste car on estime que certaines sont illégales. La communication a été compliquée avec l’administration. Gestion quantitative de la ressource, zones humides, réaménagement des cours d’eau dans le bassin versant… toutes les dispositions ont été prises pour entraver l’activité agricole ».
Des vices de procédure et erreurs d’appréciation
Un ensemble d’arguments porte sur des modifications substantielles qui ont été apportées après la consultation du public. Or les modifications ayant lieu après la consultation devraient être limitées dans leur ampleur. Par exemple : il a été ajouté une incitation à la protection des éléments d’intérêt paysager, et une nouvelle notion « d’espaces périphériques » aux zones humides devant être préservés. Une valeur guide de 18 mg/L de concentration en nitrates dans chaque masse d’eau douce superficielle a également été ajoutée, qui ne s’appuie sur aucun élément juridique. Ces différents points sont contestés par la profession. Autre point important : une disposition prévoit que le préfet détermine les pesticides dont il restreint ou interdit l’utilisation par arrêté, ce qui correspond à une violation directe de la loi en donnant au préfet une compétence qu’il ne devrait pas avoir (Code rural).
Le recours suit son cours
Concernant la gestion quantitative, le SDAGE prévoit des analyses HMUC (Hydrologie, Milieu, Usage, Climat) comme fondement des décisions prises par les SAGE, ce qui ne respecte pas les procédures prévues par le code de l’environnement suite à la parution du décret du 23 juin 2021. Ces études étant longues et coûteuses, cela risque notamment de freiner la détermination des volumes prélevables. La période de « basses eaux » est définie par le SDAGE du 1er avril au 31 octobre de manière fixe, quel que soit le contexte de l’année, alors que d’après le code de l’environnement elle devrait pouvoir être adaptée localement. De la même manière, la période de remplissage des réserves est déterminée par le SDAGE, en contradiction avec les conclusions du Varenne agricole de l’eau. « Dans un courrier de plus de 40 pages argumentées par un avocat, nous avons demandé la suppression ou la modification de toutes les dispositions que nous considérons illégales ou incohérentes. La préfète a deux mois pour répondre à ce recours gracieux. S’il ne donne pas de résultats satisfaisants, avec l’ensemble des organismes qui portent ce recours, nous pourrions décider d’engager un recours contentieux devant le tribunal administratif », conclu Nicolas Bonnefous.
Rappel : définition et principes du SDAGE
Le SDAGE (schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux) est issu de la loi sur l’eau de 1992. Il est un système de planification de l’aménagement et de la gestion des eaux pour une gestion équilibrée de la ressource en eau. Le principe de gestion équilibrée de la ressource en eau suppose de mettre en balance la préservation de l’eau et la satisfaction et la conciliation des usages, tout en prenant en compte les adaptations nécessaires au changement climatique.