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Coup de théâtre dans la crise du porc

Deux opérateurs importants de la filière porcine, Cooperl et Bigard, boycottent le marché du porc breton depuis le 10 août, remettant en question le prix minimum de 1,40€/ kg.

Le marché au cadran de Plerin a rouvert le 18 août mais sans les deux plus gros acheteurs : Cooperl et Bigard.
Le marché au cadran de Plerin a rouvert le 18 août mais sans les deux plus gros acheteurs : Cooperl et Bigard.
© archives réussir - Claudine gérard

Aucune cotation n’a lieu depuis le lundi 10 août au marché du porc breton à Plérin dans les Côtes d’Armor. C’est lui qui établit le prix de référence de la production porcine française. Les deux principaux abatteurs de porcs, Bigard et Cooperl qui contrôlent à tous les deux 45 % des achats en France, boycottent depuis le marché. Ils refusent d’acheter du porc français qu’ils jugent trop cher, de l’ordre de 25 centimes de plus par kilo par rapport à la viande allemande et espagnole. Dans l’espoir de mettre fin à cette crise et permettre au cadran de rouvrir, une table ronde au ministère de l'Agriculture, en présence des principaux acheteurs au cadran (à l'exception de Bigard et Cooperl), a eu lieu le 17 août. A l’issue de cette réunion, plusieurs représentants de la filière (interprofession, éleveurs et cadran) ont annoncé la reprise des séances de cotation le 18 août malgré l’absence de Cooperl et Bigard.

 

Changement de direction

La crise trouve son origine dans la revalorisation de la viande de porc à 1,40 €/kg sur laquelle l’ensemble des industriels et des distributeurs se sont engagés en juin dernier, sous l’égide du ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll. Bigard et Cooperl considèrent qu’ils ne peuvent plus tenir ce prix face à des concurrents européens, notamment Allemands et Espagnols, qui ont abaissé leurs tarifs et qui de surcroît sont soumis à des exigences sociales et environnementales moins contraignantes. Dans un courrier envoyé le 6 août à ses adhérents, la Cooperl explique que, pendant «qu’une volonté politique de court terme a réussi à porter le cours à 1,40 €/kg en France, l’Allemagne abaissait brutalement son prix d’achat» et « à ce jour 25 centimes séparent le cours français du cours allemand ».

«Notre effort ira en totalité à l’abattage et à la valorisation des porcs de nos adhérents », annonce-t-elle en précisant qu’elle suspend ses achats externes au cadran à compter de lundi. « C’est un prix politique qui ne peut pas exister en économie sur un marché ouvert. Depuis juillet on rogne sur nos marges, nos abattoirs sont complètement décalés en Europe. Ils perdent de 8 à 10 € sur chaque bête abattue en marge nette », renchérit Paul Rouche du Syndicat national des industriels de la viande, présidé par Jean-Paul Bigard.

 

Distorsions de concurrence

Paul Auffray, le président de la Fédération nationale porcine, dénonce pour sa part « un chantage et une prise en otage des éleveurs », par Bigard et la Cooperl, qui voudraient que les prix baissent de 15 centimes par kilo par rapport à leur niveau actuel. Et aussi «les pratiques mafieuses» des industriels allemands et espagnols qui paient leurs salariés « à 5 euros de l’heure et s’assoient sur les normes sociales avec l’approbation de la Commission européenne ». La filière porcine subit de plein fouet depuis janvier 2014 les répercussions de l’embargo russe qui plombe les cours de la viande. Malgré un redéploiement d’une partie des viandes vers d’autres zones, les éleveurs français souffrent des restrictions de marché qui ont représenté jusqu’à 10 % des débouchés à l’international. La diminution de la demande a été en outre aggravée par la hausse de la production chez la plupart de nos concurrents, notamment les Allemands et les Espagnols. Une situation qui ne semble pas près de s’améliorer avec une contraction de la consommation de viande de porc de 2 % en France au cours du premier semestre et de plus de 1 % pour celle de charcuterie.

 

Réouverture du marché au cadran

Le 18 août dernier, le marché au cadran de Plérin a repris ses cotations mais sans les deux principaux concernés Cooperl et Bigard.

Questionné sur l'issue la séance au ministère le 17 août, le président du marché du porc breton (MPB), Daniel Picard a répondu que «la mécanique du marché peut faire descendre le prix en dessous de 1,4€/kg», mais que ce n'est selon lui, «pas la volonté des opérateurs». «Il est temps qu'une cotation se tienne» a-t-il conclu. L'absence de cotation n'a jusqu'ici pas empêché le fonctionnement normal de la filière (pas de porcs bloqués dans les élevages), assure-t-on ministère de l'Agriculture. Des discussions auront lieu dès la semaine prochaine en vue de faire évoluer «le système de fixation du prix, notamment par l'adaptation partielle du fonctionnement du marché du porc breton», a indiqué le président de l'Inaporc Guillaume Roué.

 

Pistes à explorer

Le sujet de la crise porcine sera bien entendu à l’ordre du jour du Conseil exceptionnel des ministres de l’Agriculture, le 7 septembre. Outre le sujet de l’harmonisation fiscale et sociale, il y sera question des conséquences de l’embargo russe et des pistes de solution pour dégager «100 000 ton-nes de viande de porcs qui restent en stock ». En attenant, Stéphane Le Foll a indiqué qu’il aborderait le sujet avec la Commission européenne, au Sommet méditerranéen qui associe la France, l’Espagne, l’Italie et le Portugal, ainsi que le Sommet du groupe de Weimar avec la Pologne et l’Allemagne, pour « convaincre nos partenaires de la pertinence de sa démarche ». Xavier Beulin avait d’ailleurs plaidé en ce sens avant la table-ronde : « Il faut que le ministre prenne l’engagement de faire tout le travail nécessaire auprès de ses collègues européens pour qu’enfin la Commission européenne trouve des solutions, notamment face à l’embargo russe qui est une des causes de cette situation dramatique en France et en Europe», ajoutant que la Commission européenne avait « les moyens à la fois sur le plan juridique et sur le plan financier pour intervenir en cas de crise et de crise profonde… »

Stéphane Le Foll annonce un assouplissement des règles des marchés publics

Suite à son entretien avec François Hollande dans la journée, le ministre de l'Agriculture a annoncé, en conférence de presse le 17 août, la parution en septembre d'un décret qui relèvera le seuil en deçà duquel les collectivités publiques peuvent réaliser des achats sans se conformer aux règles des marchés publics. Ce seuil passera de 15 000 à 25 000 euros. Cette mesure doit permettre à la restauration collective d'acheter plus facilement des produits d'origine française. Il a aussi annoncé que son ministère travaillait à des mesures de soutien à la contractualisation dans la filière porcine. Deux réunions de travail se tiendront, une sur les promotions en septembre et une sur la contractualisation le 27 août. Une opération de promotion des Viandes de France aura lieu mardi 25 août à l’initiative des interprofessions.

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